Dans le paysage syndical, on connait les syndicats confédérés historiques de la lutte ouvrière (CGT, CFDT, FO), qui ont des représentants dans le corps des ICNA. On connait aussi le syndicat historique des contrôleurs aériens : le SNCTA.
Au milieu de ces noms familiers, l’UNSA-ICNA est malheureusement encore trop méconnu, tant par ses idées que par son histoire. Il est pourtant un acteur majeur des luttes actuelles.
Petit retour historique sur l’origine de ce syndicat…
Ils furent rapidement rejoints par de nombreux ICNA en attente d’une voie syndicale plus équilibrée.
Le début du XXIe siècle était une période faste. La période tumultueuse de la fin des années 80 avait débouché sur la création des « protocoles » qui les uns après les autres apportaient des améliorations spectaculaires au tout nouveau corps des ICNA. Le SNCTA, premier syndicat des contrôleurs était alors au faîte de sa puissance et faisait fructifier le rapport de forces extrêmement avantageux qu’il avait contribué à établir à l’occasion des luttes syndicales passées. Tout ceci s’inscrivait dans un contexte favorable car la croissance du trafic semblait durer et les politiques avaient besoin d’un contrôle aérien efficace.
En une dizaine d’années l’effectif, les salaires et les moyens techniques ont connu des améliorations exceptionnelles. Tout semblait possible.
Puis sont venues les années 2000 avec les grands projets de construction européenne.
Au sein du syndicat, des lignes de fracture commençaient déjà à s’esquisser : « syndicalistes » contre « professionnels », génération OCCA contre génération ICNA, « grands » centres contre « petits » centres, centres saisonniers contre centres non saisonniers, partisans d’une réduction des écarts au sein du corps contre défenseurs des particularismes locaux, tenants de la Fonction Publique contre pro-Agence, etc.
Les anciens avaient muté vers les centres du sud et transmis leur histoire alors que de nouvelles générations d’ICNA, n’ayant pas connu les grèves passées et les sacrifices qui avaient été nécessaires pour amener la profession où elle était, abondaient dans les centres du Nord, cristallisant toutes ces lignes de fracture au sein d’une opposition essentiellement géographique entre les centres du Nord (en particulier CDG et le CRNA E) et ceux du Sud (incluant le CRNA O).
Les projets européens ciel unique allaient bientôt accentuer cette divergence interne.
Les traités ciel unique « Single European Sky » (ou SES), dont le premier règlement fut fixé en 2004 par l’Union Européenne, prévoyaient une redéfinition de l’espace aérien européen et une homogénéisation des prestataires sur plusieurs années. Le libéralisme qui s’imposait un peu partout venait ainsi provoquer les ICNA.
Dans ce contexte politique, il fallait trouver une solution. Le SNCTA en a trouvé deux.
L’une des lignes, fortement libérale et guidée par le Bureau National de l’époque, souhaite tirer parti de cette construction pour s’émanciper de la rigidité du système Français. Les voisins de Maastricht ou d’Espagne « gagnent beaucoup plus pour faire le même métier ». Il s’agit donc de profiter de cette restructuration pour calquer notre modèle sur le leur, ce qui permettrait d’augmenter les salaires sans difficulté. Cette mouvance s’est réunie autour du projet MOSAIC, une agence européenne dans laquelle les ICNA seraient détachés, avec un statut de fonctionnaire européen. Les adaptations des conditions de travail nécessaires seraient négligeables au regard de l’augmentation de traitement obtenue, qui permettrait enfin d’atteindre la barre symbolique des 10K€ brut par mois.
Nous sommes à l’époque du « travailler plus pour gagner plus » de N. Sarkozy.
Une autre branche, plus sociale, voit d’un œil inquiet les principes de rentabilité et surtout de concurrence que la CE souhaite imposer. La fusion du modèle Français serait un nivellement par le bas au niveau des conditions de travail, qui entrainerait inévitablement une ségrégation entre les gros centres, privilégiés car lucratifs, et les plus petits organismes qui ne pourraient pas prétendre au même traitement. Cette ligne défend donc une approche plus « confédérale » dans le rapprochement des prestataires au niveau européen afin de préserver le modèle, son statut et ses acquis.
En 2007, cette différence idéologique prend un tournant institutionnel : les sections de l’ouest de la France qui ne se sentent plus à leur place au sein du Comité Régional Nord, le quittent pour rejoindre le CR Sud-Ouest : c’est la création du Conseil Régional Grand Ouest. Une première distinction est alors quasi-officielle entre le CR Nord et les deux CR GO et Sud Est.
Le Comité National est clairement divisé entre le Nord, mené par le BN qui tente d’imposer le modèle de fusion européenne, et la partie Sud qui se concentre sur les problèmes du quotidien et résiste au chant des Sirènes en défendant un modèle national ancré dans la coopération européenne.
En 2008, le BN suivi par le CR Nord tente de renforcer son modèle « corps unique » de contrôleurs en favorisant l’entrée massive de TSEEAC au syndicat. Il s’agit de s’éloigner de la logique française de corps, et en particulier celui des Ingénieurs du contrôle la Navigation Aérienne pour se calquer sur le modèle européen ATCO où le contrôleur aérien n’est que le porteur d’une licence. En étirant ainsi le corps, on réduit à néant les efforts de réduction des différentiels indemnitaires défendus jusque-là, on justifie la mise en place de disparités fortes (financières et statutaires) entre les centres et donc on légitime les particularismes locaux. C’est aussi la fin d’une formation longue, multi-rating, pour tous, là encore pour s’aligner sur les standards européens où la formation initiale est rapide et centrée sur le rating du centre d’affectation. Les CR GO et SE s’opposent ensemble à ce projet et le font échouer. Ce seront les prémices d’un rapprochement plus profond.
Fin 2008, une tournée européenne organisée par la Commission Professionnelle du SNCTA confirme les disparités de conditions de travail au sein du FABEC. Les ICNA ne pourront pas prétendre au même traitement que leurs voisins sans une casse importante de leur modèle et des conditions de travail. Ces conclusions ne sont pas acceptées par le BN.
L’affrontement entre les deux lignes, celle libérale, pro-MOSAIC, pro-particularismes locaux incarnée par le BN, et l’autre, syndicale, anti-MOSAIC, attachée à l’unité du corps, défendue par des militants du Grand-Ouest et du Sud-Est et qui se baptiseront eux-mêmes le « GOSE », semble dès lors inéluctable.
La ligne dissidente du SNCTA prépare alors un plan de réorientation de la politique du syndicat pour le prochain congrès.
On le devine, les tensions sont vives lors de cette rencontre. Au terme de débats très animés, le programme proposé par le GOSE lors du congrès de 2009 est difficilement mais globalement accepté par les congressistes.
Mais la réconciliation est impossible avec le pouvoir en place qui va alors jouer de toute son influence de l’ombre pour influencer les « swing states » et les ramener à sa cause.
Lors du vote de sortie du congrès pour le Comité National, la quasi-totalité des membres du CN issus du GOSE a la surprise d’être évincée du Comité National. Aucun représentant du nouveau plan ne pourra s’assurer de sa mise en place, ce qui le condamne d’avance. La capacité à s'opposer à la mouvance MOSAIC au sein du SNCTA est donc perdue, et l'ancien BN est réélu, transformant une défaite sur le plan des idées en victoire dans les urnes.
Une vague de démission du CN, puis du syndicat s’ensuit.
Quelques mois plus tard, inspirés par le souffle nouveau qu’avait créé la création du GOSE et désabusés par la dérive autocratique, clientéliste et ultralibérale de leur ancien syndicat, ces démissionnaires du SNCTA créent l’UNSA-ICNA. Rapidement rejoints par un grand nombre d’ICNA qui ne se reconnaissaient pas dans les lignes défendues par les autres syndicats.
C’est le début d’une nouvelle voie.
Administration - mars 2004
Le règlement cadre pour la réalisation du ciel unique européen
SNCTA - janvier 2008
Le projet MOSAIC
UNSA-ICNA - janvier 2010
Plusieurs ANSP, et plusieurs modèles
SNCTA - février 2009
Carry le rouet
UNSA-ICNA - juin 2009
Le premier communiqué de l'UNSA ICNA