Les Réserves opérationnelles

Un rapport de force avant tout

Eté 2020. La France et le monde sont dans un état d'urgence sanitaire exceptionnel et suite à une longue période de confinement ayant paralysé toute activité aéronautique, les agents tentent au mieux de redynamiser le ciel. Mais au sol, les objectifs sont différents. Profitant sans scrupules du désastre COVID-19, le CT DSNA du 16 juin annonce un projet de dispositif, censé gérer la surcapacité temporaire dans les salles de contrôle : les Réserves Opérationnelles (RO).

L'idée n'est pas nouvelle, et avait déja été suggérée lors de la table ronde issue du Rapport Vernhes, elle trouve seulement ici un terrain favorable. C’est en effet une menace majeure qui vise à grignoter le temps de repos en allant plus loin que son précurseur : la VRO. Une manière de dissoudre les jours de compensation que les ICNA obtiennent pour leur investissement et leur expertise. Un outil puissant pour préparer la flexibilité imposée et les coupes de BO à venir. Un moyen de créer ou d’attiser les tensions avec l’encadrement local. Enfin c’est une façon d’humilier les ICNA, d’accélérer le processus de destruction de leurs acquis sociaux pour prendre autant que le rapport de force temporaire le permettra.

Pourquoi négocier pendant des années quand une crise permet d'outrepasser le dialogue social ?

Comme sur la plupart des sujets majeurs, l’intersyndicale (UNSA, CFDT, FO, CGT) se réunira une fois de plus. Ensemble les syndicats boycotteront ce CT provocateur et fermeront la porte aux RO. L’UNSA ICNA communiquera autant que possible dans des salles atomisées par les mesures de ségrégation des équipes et cloisonnements divers, pour alerter les ICNA.

Le syndicat majoritaire restera quant à lui très silencieux...

« L’argent est rond pour rouler »

L’histoire est malheureusement un éternel recommencement et un des syndicats jouera seul sa partition. Le SNCTA, qui cherche désespérément à légitimer l’existence de ses expérimentations (sous une forme mutualisée) veut montrer sa bonne volonté à l’administration et participera au CT de juin, brisant l’unanimité syndicale nécessaire pour tuer dans l’œuf ce projet. Par ce geste il donne sa caution à l’administration et ouvre une voie dangereuse qu’il sera impossible d’arrêter par la suite.

En octobre, la DSNA décide finalement de ne pas poursuivre ses expés devenues gênantes et en contradiction avec l’objectif annoncé de gestion de la surcapacité permis par ses RO. Elle impose donc des conditions suffisamment inacceptables (comme la prise en compte de la vacation supplémentaire en « cycle densifié » dans le compte temps) pour que tous les centres sans exception décident de les suspendre. Dès lors, la position du SNCTA se fera beaucoup plus dure et l’unanimité syndicale sera complète. Mais il est trop tard. Le simulacre de dialogue social qui s’est mis en place est suffisant, et face aux votes unanimes CONTRE des deux CT DSNA l’administration passe en force.

Les Réserves opérationnelles seront mises en place de janvier 2021 à décembre 2023…au mieux…

Le choc

L’agenda s’accélère et les encadrements locaux s’activent en fin d’année pour expédier les modalités d’application locales. Des ICNA trop confiants dans leur premier syndicat découvrent avec stupeur le cadeau de Noël de la DSNA pour leur action sans faille pendant la crise. Puis la surprise fait place à la colère, et des mouvements de protestation se mettent en place à Brest, à CDG, à Bordeaux, à Reims…Démissions des postes de chef de salle ou adjoint chef de salle, boycott des GT ou de la formation continue, menaces de régulations…

Les RO auront au moins eu le mérite de révéler la vraie nature de notre encadrement national, et de sortir brusquement les ICNA de l’apathie qui gagnait peu à peu les centres.

Pendant ce temps, des RO Exceptionnelles seront créées pour délayer le démarrage du compte temps. Suite aux différents reports de la fin de l’état d’urgence, le compte temps débutera finalement le 1er juin 2021.

Un nouveau variant

La grogne des ICNA persistera et atteindra les oreilles du DSNA lors de son premier été 2021. Le CT de septembre y faisant suite donnera lieu à un contexte de dialogue différent de celui qui prévalait lors de l'année précédente. Le DSNA recherchant un apaisement reviendra sur certains points aberrants (comme les heures de rappel possibles, dénoncées en recours de justice par l'UNSA-ICNA), accordera la sécurisation du 1j/2 exigée par l'UNSA-ICNA, mais surtout présentera un nouveau système de compte-temps individuel.

Celui-ci, même s'il reste un indicateur dangereux s'il était utilisé sans discernement, n'est plus le dissolvant à récupérations qu'il était à l'origine. Désormais uniquement négatif ou nul, il classe les récupérations selon trois types (Jro,Jmt,Jl) avec des conditions de dépôt plus ou moins contraignantes. L'UNSA-ICNA, s'il ne peut toujours pas se satisfaire d'un tel système, obtiendra néanmoins des améliorations de cette classification, comme la totalité des JRH en Jmt et continuera d'insister sur la reconnaissance d'une pondération des heures hebdomadaires effectuées au delà de 32h.

La suite de l'histoire est toujours en cours d'écriture...